Ultime saison pour Les Engagés !
Les Engagés, ultime saison thriller pour la série LGBT+
Après deux saisons à succès, « Les Engagés » reviennent avec un troisième et dernier chapitre intitulé « XAOC »
(chaos en Russe), placé sous le signe d’un thriller ! Une ambiance plus sombre où vont se dérouler des situations
qui dépassent les personnages et qui vont les amener à Bruxelles et Saint-Étienne et à fuir des meurtriers.
Des actions qui amènent à un changement de format, plus long (3 épisodes de 45 mn) que pour les saisons précédentes.
Alors que la série LGBT+ est disponible sur la plateforme FranceTV/Slash (www.france.tv/slash), la saison 3
« Les Engagés : XAOC » vient de sortir en DVD & VOD, ainsi que « Les Engagés – Intégrale » en Coffret DVD
(Édition Collector Limitée) & VOD. Après un lancement remarqué à « Chéries-Chéris » (festival du Film LGBTQI&+++
de Paris), Sullivan Le Postec (créateur et co-réalisateur) nous explique les enjeux dramatiques de cette 3ème saison !
La série touche à sa fin, que ressentez-vous ?
C’est à la fois une vraie satisfaction d’aller jusqu’au bout d’un projet et d’avoir pu vraiment réfléchir à
ce qui pouvait arriver aux person-nages. La série existe dans ma tête depuis dix ans, donc c’est un gros chapitre qui se referme. On a réussi à faire ce qu’on voulait, on a passé des étapes, on a grandi, donc on arrête au bon moment !
Quand vous avez démarré, connaissiez-vous déjà la fin ?
Non, je ne savais pas quand ça allait s’arrêter, ni comment. C’est quelque chose qui grandit petit à petit, avec des intuitions, des éléments en tête qui parfois se confirment et d’autres fois non. Des personnages arrivent, les choses changent. Il y a certaines directions comme le personnage de Thibaut (Éric Pucheu), je savais qu’il aurait un côté politique, et qu’Hicham (Mehdi Meskar) a un futur beaucoup plus fluide… Je n’en dis pas trop sur lui, à part qu’il est polyamoureux.
Qu’est-ce qui explique l’évolution de Thibaut qui passe d’un homme mystérieux et sombre à plus serein et confiant ?
Oui, c’est l’histoire de comment un homme arrive à se réparer ! Lorsque Hicham arrive, il voit un homme fort qui n’a peur de rien, mais en fait Thibaut est un homme cassé. Il y a une relation entre ces deux-là qui se crée, qui va leur permettre d’avancer tous les deux, de surmonter les choses. C’est un amour amical très pur et très sincère entre eux. Thibaut s’est confronté à son passé, aux cadavres dans le placard, c’est ça qui a changé beaucoup de choses. Parfois, vouloir aider les autres n’est pas bon tant qu’on ne s’est pas aidé soi-même !
« Le coming-out d’Hicham, c’est le mien. »
Y a-t-il un peu de vous dans ces personnages ?
Ça dépend du moment ! J’ai conçu Thibaut et Hicham pour créer un débat, un conflit interne que je ressens souvent : ce côté pacifiste de l’un et colérique de l’autre. La scène du coming-out de Hicham, c’est la mienne ! Il y a beaucoup de choses de Thibaut en moi aussi. C’est le conflit entre les deux qui fait qu’ils peuvent marcher main dans la main.
D’un format de 10 mn (saisons 1 & 2), vous passez à 45 mn. Comment avez-vous tiré la trame dramatique ?
Les 2 premières saisons étaient disponibles sur une plateforme télé, Studio 4, et ensuite mis sur YouTube. On espérait très fort que la nouvelle plateforme de France Télévision, Slash, continue avec nous. Ils préfèrent les longs formats et ça collait avec mes envies de développer un peu mieux les personnages, avoir plus de temps
et entrer plus dans les détails. Dans l’écriture, j’ai pu allonger les scènes, approfondir les émotions. La nouvelle saison commence sur une agression, ça fait entrer dans un thème thriller, donc l’envie d’avoir plus de temps allait parfaitement avec ce virage !
C’est aussi une série engagée et politique car vous évoquez la radicalisation dans les pays de l’Est !
C’est un fil qu’on avait commencé à introduire dans la deuxième saison avec la Tchétchénie. Je remarque que les gens qui ne sont pas LGBT ne savent pas forcément que ces chasses à l’homme existent, donc j’avais encore plus envie d’explorer ça ! En Pologne aussi, il y a des zones anti-LGBT (NDLR : LGBT-free zones) : on enferme des gens sous prétexte qu’ils ne sont pas hétéros. J’avais envie d’incarner ça dans cette saison.
Vous vous inspirez aussi de l’actualité (mort de George Floyd…). Pourquoi ne pas le nommer ?
La plupart des épisodes ont été écrits avant l’affaire George Floyd (NDLR : afro-américain mort lors de son interpellation par la police à Minneapolis en 2020), même si le tournage s’est fait l’année dernière. Par contre, la mention de son nom a été enlevée au montage, j’ai préféré ne pas la garder, j’avais peur du danger de pointer une affaire précise. C’était une envie de ne pas vouloir dire que ce n’était qu’une seule affaire, mais de montrer que c’est un aspect systématique, qui arrive dans beaucoup d’affaires.
Entre trouple, incompréhension des genres, violences homophobes, religion, la cité… N’avez-vous pas peur d’être trop « moraliste » ?
C’est toujours ma bataille sur ce projet. C’est compliqué de ne pas l’être ! J’ai la chance de bien connaître les acteurs et de pouvoir leur donner des choses à dire qu’ils assumeront et qu’ils diront correctement. J’ai quand même essayé de mettre des points de vue différents pour faire s’affronter des idées. Je voulais sous-entendre qu’on est dans un monde compliqué et qu’il faut en tenir compte !
C’est peu courant de parler du milieu LGBT en dehors de Paris !
J’ai vécu longtemps à Lyon. Quand on a commencé, j’avais directement écrit pour Lyon, ça ne pouvait pas se passer à Paris. Les associations parisiennes sont déjà médiatisées et il y a cette notion de carrière que je ne voulais pas mettre dans la série. Thibaut devait faire les choses pour les personnes LGBT et pas pour son intérêt personnel. Il fallait donc une ville assez grande et avec des contrastes politiques. À Lyon, on a des quartiers d’extrême droite et cent mètres plus loin, c’est l’extrême gauche. Pour Hicham, son passé est à Saint-Étienne, il y a l’image de sa mère tout le temps sur lui, sur ses épaules, cette question géographique était importante. Pour toutes ces raisons, l’histoire ne pouvait définitivement pas se dérouler à Paris.
Comment avez-vous fait pour qu’une série LGBT française soit un tel succès international ?
On a beaucoup vendu la série à l’étranger : Angleterre, Brésil, Pologne, Espagne… Je savais que c’était possible, mais je n’aurais pas parié là-dessus ! J’ai mis 5 ans à la vendre, à trouver des diffuseurs et producteurs. J’ai commencé en 2011 à travailler dessus. « Les Engagés » est sorti la même année
que le film « 120 Battements Par Minute » et le documentaire « Océan », ce n’est peut-être pas un hasard. On s’est rendu compte que nos petites histoires LGBT sont plus rentables que les hétéros ne le pensaient !
Y a-t-il une scène en particulier qui vous a vraiment marqué dans cette dernière saison ?
Le tournage a été compliqué, on a tourné en Octobre / Novembre 2020, il y avait un couvre-feu et bientôt le
deuxième confinement. Une scène que j’aime beaucoup est celle de l’audition d’Anzor (Ishtvan Nekrasov) à la Commission européenne de Bruxelles. C’est quelque chose que j’avais beaucoup imaginé et que j’ai pu réaliser, comme les plans entre un député et la traductrice, les longues focales, j’ai adoré ça !
Mettrez-vous de nouveau en scène des personnages LGBT+ ?
Je ne sais pas ce que je vais faire ensuite, j’ai plusieurs projets. Ce qui est sûr par contre, c’est que je continuerai à mettre en scène des personnages LGBT. Mais il faut le dire, c’est quand même compliqué de vendre des projets avec ce genre de personnages !
Propos recueillis par Damien Guignard
Photographies : © Nicolas Robin-FTV-Astharté & Compagnie, Jo Voets-FTV-Astharté & Compagnie & © 2020 Nicolas Robin (couverture DVD)